Simone a 76 ans, et besoin d’assistance.
17 janvier 2018, la catastrophe. Son mari décède à l’hôpital, l’y laissant seule et désemparée. Simone ne sait pas passer un appel avec le téléphone portable dont il se réservait l’usage. Dans le répertoire, une infirmière parvient à trouver le numéro d’une amie à appeler à l’aide. Elle le compose, passe l’appareil à Simone, qui le lui remet à la fin de la communication, ne sachant quoi en faire alors.
L’assistance comme une bouée de sauvetage
Quarante années de vie commune, quarante années à le laisser gérer la vie administrative et financière du couple. Et maintenant ? la famille ? elle en est coupée depuis si longtemps… Où trouver l’assistance dont elle a besoin ?
Mon réseau la met en contact avec moi. Nous sommes dans l’urgence. La situation de ma cliente est plus que précaire : à un endettement chronique et dangereux s’ajoute la totale méconnaissance de sa situation administrative et financière. Peu d’archives papier, Monsieur avait opté pour la dématérialisation du traitement. Il est malheureusement parti avec les éléments de connexion et l’ensemble des identifiants et mots de passe. L’ordinateur est verrouillé, pas de pense-bête pour nous aider.
Première opération : établir la liste des organismes auxquels ils s’adressaient. Pour cela, il faut rassembler les documents disponibles, les trier puis les classer. Enfin, faire appel à la mémoire de Simone.
Un tableau de bord recense les premières informations collectées. Elles sont rapidement complétées avec les coordonnées des établissements identifiés. Grâce au téléphone où Monsieur avait eu l’excellente idée de permettre la consultation de l’une des messageries qu’il utilisait, je peux retrouver les comptes et profils en ligne et créer ceux qui manquent.
Trier, classer, exploiter, tracer et archiver
Simone ne comprend pas bien ce qu’il se passe. Elle a conscience des enjeux et de la nécessité de gagner l’autonomie qui lui fait encore défaut. Sans toutefois imaginer un instant comment s’y prendre, sans être non plus persuadée qu’elle saura se montrer à la hauteur : ce monde la dépasse, l’univers qu’elle découvre lui est totalement étranger.
Cependant, avec les bribes récoltées précédemment et quelques heures de travail, je parviens à reconstituer la quasi-totalité des accès aux ressources pour mettre à jour la situation et procéder aux différentes démarches induites par ce récent veuvage.
Aux opérations en ligne viennent s’ajouter les nombreuses démarches par téléphone et par courrier. Je finis par gagner la confiance de mes interlocuteurs. Nous sommes dans un milieu rural, où il est plus facile de se connaître et de générer un capital confiance confortable.
Les jours et les semaines passent, la situation s’assainit. Isolée, esseulée, Simone semble trouver en ma présence une forme de réconfort. Petit à petit, je lui montre le détail de mes travaux. Il ne s’agit pas de lui mettre le pied à l’étrier pour la lâcher au galop, mais bien de l’accompagner vers une certaine autonomie.
La sérénité au bout du compte
Sur ma proposition, nous avons rencontré ensemble une assistante sociale de l’assurance retraite. Celle-ci a trouvé la situation bien prise en main. Elle nous a apporté son concours en facilitant la constitution et le traitement du dossier de demande de la CMU-C, obtenue quelque temps plus tard.
Si l’ordinateur lui restera sans doute à jamais étranger, Simone s’accoutume au téléphone, fixe ou portable. Elle apprend à lire et à envoyer des SMS. Elle ne craint plus de passer un appel. Ce dernier point demeure cependant limité aux personnes qu’elle connaît. Pour le reste, elle compte sur moi.
Aujourd’hui, ses papiers sont en ordre, sa situation administrative aussi. Il nous aura fallu pas loin de quatorze mois de cette assistance pour venir à bout des démarches liées à la réversion des revenus de Monsieur, abonné à de nombreuses caisses de retraite. Nous en aurons même profité pour régulariser une pension de retraite que Simone n’avait pas réclamée en son temps, faute d’avoir eu connaissance de cette ressource.
Les dettes ont fait l’objet de négociations avec le créancier unique. Nous avons mis en place un échéancier. L’apprentissage de la gestion du budget fut aussi une aventure. Ces dettes seront remboursées à la fin de cette année. À partir du mois de novembre, le pouvoir d’achat de Simone va faire un bond non négligeable.
Le tableau de bord s’est enrichi, Simone sait maintenant le lire. Mes visites se sont espacées. Depuis quelques mois, je ne viens plus qu’une fois par mois, pour une petite heure d’assistance administrative. Ou à la demande si nécessaire, ce qui demeure très rare.
Un coup de téléphone de temps à autre, juste pour rassurer. Tout va bien maintenant.